À propos de l’exposition
P O U R R I T U R E (travail en cours)
L'exposition s’inscrit dans une démarche de recherche et d’expérimentation menée par l’artiste dans le cadre de sa résidence à Québec.
"Il y a quelque temps, la moisissure s’est invitée dans mon appartement, d’abord sur mon plafond, puis sur les murs, et finalement sur mes vêtements, comme une intrusion dans mon espace intime. Cette expérience m’a fait traverser une série d’émotions intenses et parfois contradictoires : j’en voulais presque personnellement à mon environnement de prendre des allures morbides. J’ai voulu faire glisser mon point de vue, prendre de la distance en me rapprochant — en zoomant. J’ai réussi à trouver de la beauté là où le dégoût et la peur s’imposaient comme une fatalité. Plus tard, en travaillant à la cueillette pour une coopérative, j'ai dû cueillir et puis jeter des tomates pourries. Dans cet amas de légumes « morts », quelque chose est venu me fasciner. De nouvelles textures et couleurs se formaient, l’intérieur de leur chair se découvrait. Devenues immangeables, elles me semblaient encore plus belles.
Mon œil a toujours voulu plonger dans les profondeurs de la matière, sous la peau, en dessous de la surface, comme pour me rapprocher du mouvement de la vie, pas toujours visible ou perceptible.
Avec P O U R R I T U R E, je souhaite amener à poser notre regard sur ce qui n’est pas censé être contemplé, sur ce qui peut effrayer, sur une apparente étrangeté. J’aimerais valoriser ce qui germe de ce qui est considéré comme mort, écœurant ou malsain. Au travers de mon travail de plasticienne et scénographe, je m’intéresse à la notion de pourriture parce qu'elle met en lumière et célèbre ce qui est inhérent à la création, c’est-à-dire la transformation de la matière.
À contresens de notre système capitaliste, je vois de la beauté précisément à cet endroit de non-rentabilité. J’aimerais proposer ce point de vue et inviter le·a spectateur·ice à s’attarder, à être émerveillé·e là où nos yeux n’ont plus l’habitude de regarder ; à reconsidérer le vivant non humain. De par ce plus grand angle perceptif, j’espère apporter par mon travail une nouvelle manière d’appréhender le réel et métamorphoser notre regard."
- Camille Collin